Le braqueur et le patron

J’ai eu la chance d’être plusieurs années aumônier de prison. Je me souviens d’un gars incarcéré pour plusieurs braquages qui préparait sa sortie. Il avait besoin d’un travail ainsi que d’un logement. Après avoir demandé aux frères dominicains de mon couvent si nous pouvions l’héberger, je me suis mis à la recherche d’un travail. J’avais trouvé un employeur dont la seule condition était que le futur employé ne soit ni un voleur ni un escroc. Situation compliquée ! J’ai demandé à ce gars l’autorisation de dire pourquoi il était en prison. Vous auriez dû voir la tête du chef d’entreprise ! J’ai insisté pour qu’il lui accorde au moins un rendez-vous, car même s’il n’était pas embauché, le fait d’avoir un entretien permettait de montrer à l’administration pénitentiaire qu’il se démenait pour son avenir.

Rien n’est impossible à Dieu ? En effet, j’étais persuadé qu’en le voyant, le directeur des ressources humaines lui donnerait le poste… ce qui n’a pas manqué. Il a pu ainsi sortir, avoir un travail et un logement provisoire en attendant de trouver un appartement et, au bout de plusieurs mois, on lui proposait un CDI.

Nous n’avons pas tous été incarcérés, cependant nous pouvons imaginer ce que signifie l’interminable attente en prison. Ce garçon n’était pas particulièrement croyant et je me suis fait l’effet d’être, comme dans l’Évangile, celui qui demande pour l’autre, celui qui a la foi pour l’autre qui est dans le besoin, cette foi requise dans les récits de miracles accomplis par Jésus : dans la guérison du serviteur du centurion*, Jésus déclare n’avoir jamais vu une telle foi en Israël. Et nous ? Quelle est notre foi ? Savons-nous espérer contre toute espérance, espérer pour les bons et les moins bons, espérer un nouveau départ à celui qui a commis une erreur ? Et si durant cet avent nous priions pour ceux qui n’osent pas demander ? Et si c’était aussi ça, notre mission, ce que Jésus attend de nous ?

* Luc 7, 9